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20 juin 2006 2 20 /06 /juin /2006 17:23

Et si la tolérance Zéro conduisait à l'inverse de ce qui est recherché ?


La "tolérance zéro" invoquée par le ministre français de l'Intérieur Nicolas Sarkozy dans sa lutte contre la criminalité en banlieue pourrait conduire à l'inverse du résultat recherché et faire augmenter les tensions, selon une étude réalisée par un universitaire franco-américain.


Pour Bernard Harcourt, 43 ans, professeur de droit à l'université de Chicago, le choix de lutter contre la petite criminalité quotidienne dans l'espoir de décourager la grande est "dangereux". "On s'appuie sur une politique qui ne fait baisser ni les meurtres ni les vols et on gaspille les ressources (policières). Les relations de plus en plus tendues entre la police et les populations dans les quartiers favorisent aussi un embrasement de la situation" comme lors des émeutes de banlieue en France, dit à l'AFP M. Harcourt qui a mené une étude approfondie de cinq grandes villes américaines.
Dans un essai récent, intitulé "L'illusion de l'ordre: incivilités et violences urbaines, tolérance zéro?", paru aux éditions Descartes et Cie en France, et Harvard University Press aux Etats-Unis, il établit un parallèle entre les Etats-Unis et la France. "J'essaie de montrer que l'expérience des villes américaines souvent citées en exemple en France pour justifier la politique de tolérance zéro n'est soutenue ni par les faits ni par les statistiques", dit-il. La "tolérance zéro", invoquée par Nicolas Sarkozy, découle de la publication en 1982 de la théorie des "fenêtres cassées" selon laquelle pour faire baisser la criminalité, il faut d'abord s'attaquer aux désordres urbains mineurs, des graffitis à la mendicité en passant par la réparation des fenêtres cassées.
Selon M. Harcourt, ce concept, popularisé par l'ancien maire de New York Rudy Giuliani crédité d'avoir "nettoyé" sa ville de cette manière, s'attaque aux symptômes et pas aux causes du problème. Le chercheur fait valoir que la baisse de la criminalité constatée alors à New York
(-60,1% sur les vols entre 1993 et 1996) ne faisait en réalité qu'accompagner une tendance identique à l'échelon national. Selon lui, elle est due surtout à la fin de "l'épidémie" de crack, toute une génération de jeunes y ayant renoncé après avoir été témoin de ses ravages. Il souligne qu'à Los Angeles, la chute du pourcentage de vols a été la même qu'à New York dans le même temps, avec des moyens en hommes inférieurs dans une police engluée de corruption. Le chercheur ajoute que dans le même temps, les plaintes pour bavures policières ont augmenté à New York de quelque 68%. Il cite le cas de personnes désarmées abattues par la police, ou celui d'un homme battu et agressé sexuellement par la police. Tous les procès et les 190.000 arrestations qui ont suivi à l'intérieur de la police, ont coûté quelque 400 millions de dollars, selon lui.
L'un de ses arguments les plus probants porte sur le suivi de 4.600 familles à très bas revenus vivant dans des quartiers violents de cinq grande villes (New York, Los Angeles, Chicago, Baltimore et Boston) à qui l'on a donné la possibilité de déménager dans des quartiers plus calmes pour échapper au cycle de la violence. Trois à cinq ans plus tard, l'étude montre qu'il n'y a aucune différence de taux de criminalité entre ceux qui sont partis et ceux qui sont restés dans les quartiers. "Vivre dans un quartier calme n'a pas changé les comportements comme nous l'aurions pensé" dit le chercheur. Créer l'apparence de l'ordre est important, dit-il, mais si l'on se sert de la police pour régler des problèmes sociaux, au lieu de s'attaquer à la vraie criminalité, on utilise mal ses ressources limitées. Selon lui, la criminalisation des problèmes sociaux ne sert qu'à exclure un peu plus des cohortes de gens déjà marginalisés. "Il devrait y avoir une police plus ciblée sur les crimes sérieux" comme "la drogue et les gangs".
AFP
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16 juin 2006 5 16 /06 /juin /2006 16:06
La peur,
objet de toutes les politiques
Rencontre avec Laurent Bonelli, chercheur en sciences politiques
 
Territoires : Les débats politiques sur l’insécurité sont alimentés par nombre d’experts. Certains, sans nuance, prônent une compréhension très sécuritaire de la situation. D’autres, tel Sébastian Roché 1, portent un discours très entendu par les élus de droite comme de gauche, basé sur le sentiment d’insécurité et les incivilités. Quel rôle a ce type de discours dans la politique sécuritaire de l’actuel gouvernement ?

Laurent Bonelli : Sébastian Roché s’est intéressé à la question de la sécurité au travers de l’étude du " sentiment d’insécurité ". Une notion qui n’est pas un objet scientifique mais fut élaborée dans et pour le débat politique 2. Le sentiment d’insécurité apparaît dans le débat politique à la fin des années 70, notamment dans le rapport Peyrefitte de 1977, Réponses à la violence, qui dit qu’il faut distinguer la montée du crime de celle de la peur du crime. Pour mesurer cette peur du crime, la commission commande un sondage. Le rapport sera assez vite oublié, mais l’idée de cette séparation entre violences et peur demeure, avec son corollaire : si elles sont différentes, il faut mettre en œuvre des actions elles aussi différentes. Ce sera le point d’entrée en politique de la sécurité. Les élus – notamment locaux – ne peuvent pas grand chose contre la délinquance : un maire ne va pas intervenir dans un braquage. Par contre, il peut jouer sur le " sentiment d’insécurité ", sur les peurs individuelles et collectives de ses administrés. Il peut par exemple recruter une police municipale, installer des caméras de vidéo-surveillance, changer l’éclairage public, voire même faire accompagner les personnes âgées par des agents pour aller retirer de l’argent, comme on le voit à Paris, ou à Créteil… La peur est un terrain que les élus peuvent investir.

Ces actions n’ont pas de conséquences sur le terrain strict des violences, de la sécurité ?

Peut-être à la marge. Mais elles ne sont pas faites pour cela, elles sont efficaces contre le sentiment d’insécurité. La police municipale rassure quand elle patrouille, mais son action contre la délinquance se réduit le plus souvent à mettre des contraventions pour mauvais stationnement. Un meilleur éclairage public atténue les inquiétudes. En termes de prévention des violences, toutes les études prouvent que la vidéo-surveillance n’a d’effet que dans des espaces clos : grands magasins, parkings…, parce que le lien entre la constatation d’un fait et l’intervention est immédiat. Dans l’espace public, ce lien est plus qu’hypothétique... À bien des endroits, on peut voir des jeunes qui dealent tranquillement sous l’œil des caméras. Bien des élus seraient inspirés d’installer de fausses caméras avec des diodes qui clignotent, vu le prix exorbitant des systèmes de vidéo-surveillance ! L’effet serait presque le même… Enfin, l’accompagnement des personnes âgées peut prévenir une agression, mais, là encore, cela remplit surtout très bien l’objectif prioritaire de rassurer certaines fractions de la population.

Le sentiment d’insécurité est donc devenu le point central du débat politique. Comment glisse-t-on vers le discours sécuritaire actuel ?

Reprenons le fil. À partir de 1983, l’insécurité devient un véritable enjeu aux élections municipales. Et cela va aller crescendo jusqu’en 2002. La notion de " sentiment d’insécurité " va permettre à de nombreux élus de décrire le ras-le-bol d’une partie de leur population, la peur des gens de traverser les groupes de jeunes dans le hall des immeubles, etc. Et peu importe le caractère scientifiquement limité de la notion. Surtout, dans ses travaux, Roché instaure un lien de causalité entre " sentiment d’insécurité " et " incivilités ". Les " incivilités ", il ne les a pas inventées ; c’est un concept qui vient des États-Unis et qu’on retrouve dans les travaux de Wesley Skogan sur la " spirale du déclin ", repris par Wilson et Kelling qui aboutissent, eux, à la théorie de la " vitre brisée ". Ces chercheurs ont fait des enquêtes sur les modes et les vitesses de dégradation des quartiers, et ils en ont conclu que les petits désordres attiraient des désordres plus grands (des boîtes aux lettres dégradées, on passe graduellement au trafic de drogue, etc.). En fait, ce continuum a été détruit plus tard par Bernard Harcourt ou Loïc Wacquant, à partir des mêmes données d’enquête, en montrant qu’on pouvait leur faire dire tout et son contraire 3. Mais cette idée que les petites incivilités sont les responsables du sentiment d’insécurité marche très fort auprès des élus ! Cela leur donne une théorie immédiatement opératoire pour jouer contre la peur : lutter contre les petites incivilités va souvent devenir le résumé des politiques de sécurité locale. Et certains vont prendre cette logique au pied de la lettre : puisque les grands problèmes commencent avec les petits désordres, il faut taper très fort dès les premiers faits : c’est la " tolérance zéro " qui sera menée à New York. En France, nous n’y sommes pas, mais quand on voit les réformes pénales, il semblerait que l’on en prenne le chemin.

Ce lien entre incivilités et sentiment d’insécurité fait plus que séduire les élus, il s’impose véritablement dans tout débat politique et médiatique.

Tout ceci se passe au début des années 80, à un moment où on observe un vrai regain de tension dans les quartiers populaires. La principale explication est un affaiblissement des mécanismes disciplinaires antérieurs, notamment l’usine, qui était un appareil de normalisation très efficace pour les jeunes sans qualification. Attention, quand je dis l’usine, c’est l’emploi à l’usine à plein temps, avec un statut stable et des résistances ouvrières fortes. Quand un jeune violent entrait à l’usine, le système le faisait arrêter les " petites conneries ", notamment parce que le milieu du travail intégrait ses propres valeurs : la virilité dans le travail manuel et l’anti-autoritarisme dans la lutte syndicale. Le fait de pouvoir se projeter dans une perspective d’avenir terminait de le " ranger ". Ce schéma est progressivement remplacé à partir de la seconde moitié des années 70 avec l’arrivée du post-fordisme, de l’automatisation et des délocalisations, par un avenir ouvrier beaucoup moins garanti : c’est le chômage de masse, l’intérim et les contrats précaires. Pierre Bourdieu, avec l’exemple du sous-prolétariat algérien 4, a parfaitement démontré combien la précarité existentielle enferme dans l’immédiateté. Dans cette situation, le jeune est enfermé dans une quotidienneté faite de débrouilles (intérim, recel, deal), et on sait qu’il n’y a rien de plus propice au désordre. À cette période, on voit revenir des comportements présents au début de la révolution industrielle, quand les travailleurs étaient des journaliers. La seconde explication du regain de violence au début des années 80 est, bien sûr, " l’explosion " du cadre scolaire : la massification de l’enseignement fait que l’on retrouve tout un tas de jeunes à l’école, mais qu’ils ne s’y retrouvent pas ! Ils sont pris dans un temps scolaire alors que l’école, contrairement à ses promesses, les laisse en bas des hiérarchies sociales. Résultat : des chahuts à l’école et une période d’apesanteur sociale propice aux petits désordres à l’extérieur. Et, bien sûr, se rajoute à cette situation le fait que les quartiers se transforment en même temps, avec le départ des plus aisés qui laissent les lieux aux plus pauvres et aux plus précaires. Cette évolution traduit en fait une crise de reproduction des milieux populaires, qui va creuser des fractures entre générations. C’est l’avènement de conflits entre des vieux ouvriers de plus en plus précarisés et des jeunes sans affectation qui occupent l’espace de manière de plus en plus visible. Ces tensions vont se traduire dans une partie de la population par ce qui sera interprété politiquement comme une " demande de sécurité " que les votes FN traduiraient 5.

Que revêt la lutte contre les incivilités ?

C’est la menace de couper les allocations familiales, les vigiles des bailleurs, la lutte contre les tags, la multiplication des patrouilles de police, etc. Ces modes conceptuelles (vitre brisée, tolérance zéro, etc.) viennent en fait donner une cohérence pseudo-théorique à leurs pratiques ordinaires. Lesquelles combinent le plus souvent trois volets : rassurer les braves gens, contrôler et menacer la minorité des pires, en même temps que l’on négocie avec certains d’entre eux. Rares sont les communes qui n’ont pas recours à l’ensemble de ces technologies sociales, même si la dernière est rarement affichée comme telle !
En dépit du fait qu’elle soit fréquente, elle est régulièrement dénoncée par ceux qui n’y sont pas associés comme une manière " d’acheter la paix sociale ". Alors qu’en fait, la gestion d’une municipalité nécessite de savoir concilier des intérêts divergents. Tout le monde n’est pas comme le maire d’une grande ville du Sud-Ouest de la France qui, à la suite d’une flambée de violence due au décès d’un jeune, disait : " Les quartiers, je m’en fous, tout ce que je veux, c’est qu’ils ne brûlent pas, c’est mauvais pour l’image de ma ville. " Hélas, il semblerait que dans un contexte où les quartiers se dégradent socialement, où leurs revendications politiques peinent à se faire entendre, les voies coercitives tendent de plus en plus à l’emporter sur les autres. Et on ne voit pas ce qui pourrait en sortir de bon.
Propos recueillis par Nicolas Leblanc

1 Sébastian Roché est directeur de recherches au CNRS et professeur à l'IEP de Paris et de Grenoble. Il est l‘auteur de La société incivile. Qu’est-ce que l’insécurité ?, Seuil, 1996 ; et dernièrement de Police de proximité. Nos politiques de sécurité, Seuil, 2005.

2 Voir les critiques de Renée Zauberman, dans " La peur du crime et la recherche ", Année sociologique n° 32.

3 Bernard Harcourt, Illusion of order. The false promise of broken, windows policing, Harvard university press, 2001 et Loïc Wacquant, Punir les pauvres, Agone, 2004.

4 Pierre Bourdieu, " Les sous prolétaires algériens ", Agone n° 26/27, 2002.

5 Sur le caractère faux de ce raisonnement, voir Annie Collovald, Le " populisme du FN ". Un dangereux contresens, Paris, Le Croquant, 2004.

Article paru dans Territoires n° 468 "Les collectivités locales face au libéral-sécuritaire: Accompagner ou résister"
Territoires est la revue de l'ADELS, l'Association pour la démocratie et l'éducation locale et sociale.
http://www.adels.org/territoires
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16 juin 2006 5 16 /06 /juin /2006 15:53


« On a les émeutes qu’on mérite.


Un Etat pour lequel ce qu’il appelle l’ordre public n’est que l’appariement de la protection de la richesse privée et des chiens lâchés sur les enfances ouvrières ou les provenances étrangères est purement et simplement méprisable. » (Alain Badiou, philosophe)

En octobre et novembre 2005, de nombreux quartiers populaires français connaissaient un embrasement d’une ampleur inédite. Pendant plus d’un mois, les médias, les politiques, le monde des « élites » et leurs adorateurs entretinrent autour de ces évènements un climat détestable, aux relents – les mots sont pesés – racistes, autoritaires, fascistes. Un climat attisé par des mots et des actes, tandis que personne – ou presque – ne fit entendre une voix discordante. Pourtant, il y avait là des « raisons suffisantes de descendre dans la rue et montrer de quel côté nous étions », et, ainsi, « ce n’est pas le supposé silence des jeunes qui doit être interrogé, c’est celui de ceux qui n’étaient pas avec eux. »

Cinq mois plus tard, lorsque paraît cet ouvrage, tout semble oublié. C’est justement « face à l’oubli programmé de la révolte » que les cinq personnes à l’origine du livre se proposent « d’en recomposer quelques éléments, les rendant visibles en en faisant trace ». Pratiquement, faire trace signifie ici donner à lire et à sentir ce climat, ces mots et ces actes, en compilant et agençant textes, enquêtes, citations.


« Il faut défendre la société contre l’ordre. Il faut donc défendre les émeutiers contre la bêtise. (…) Il faut défendre la société et l’ordre de la République ne nous y mène pas. » (Yann Moulier Boutang)

L’ouvrage insiste sur un aspect central, pourtant peu traité ailleurs que dans des cercles militants : l’ampleur de la répression – inouïe. Elle fut réclamée par le ministre de l’Intérieur et celui de la Justice, Pascal Clément, qui demanda au cœur des évènements aux policiers « de faire le plus d’interpellations possibles » et aux procureurs de « requérir les peines les plus fermes », pour « adresser un message clair aux Français d’une part, aux délinquants d’autre part » (sic). On trouve ici plusieurs comptes-rendus d’audience des Tribunaux de grande instance de Bobigny, de Toulouse, et surtout de Lyon, où Jérôme Leguay a suivi des comparutions immédiates : il note l’assurance des magistrats contrastant avec la timidité des avocats ; le caractère politique et moralisant des plaidoiries du procureur (représentant le ministère et ses directives), la sévérité de ses réquisitions, suivie par celle des verdicts – sévérité « relativement à d’autres agissements » et « eu égard parfois au contexte d’incertitude quant à l’établissement des faits » ; ou encore, la fermeté exigée parce que tel inculpé n’a pas de casier judiciaire. Les auteurs dressent des listes de verdicts, donnent des chiffres de la répression et plaident pour l’amnistie générale – toujours d’actualité.

Une place importante est par ailleurs laissée à des « interventions » recueillies ici et là, c’est-à-dire des analyses ou des points de vue jugés pertinents pour évoquer cette « révolte en toute logique ». On retiendra notamment l’article de Stéphane Beaud et Michel Pialoux ( « La ‘racaille’ et les ‘vrais jeunes’, critique d’une vision binaire du monde des cités »), et le communiqué des associations DiverCité et Ici & Là-Bas ( « La meute, l’émeute, l’impasse ») – sans doute le meilleur texte qui ait été écrit sur le « surgissement » de novembre. Interviennent également la parole d’enfants et d’élèves libérée par des professeurs, le témoignage d’une famille d’une victime de la répression, d’un jeune emprisonné suite aux évènements – autant de paroles habituellement écartées ou oubliées. De quoi fissurer, pudiquement et sans prétention d’omniscience, un certains consensus…

« ... le consensus, c’est-à-dire la paix pour certains au prix de la guerre acceptée contre d’autres. »


Au-delà de l’analyse et des points de vue, cet ouvrage est une grande réussite en ce qu’il recrée une atmosphère, une ambiance, en disposant judicieusement entre chaque article des citations – jouant avec elles, les faisant se confronter, sans jamais les commenter. Sont présentes les plus lamentables perles des hommes politiques, policiers, journalistes, « intellectuels » d’alors, confrontées sur la même page ou quelques pages plus loin à des citations d’artistes et d’intellectuels qui semblent « patronner » l’ouvrage, de Foucault à Deleuze en passant par Rancière, de Beckett à Rimbaud en passant par Brecht. La réalisation est féconde et, au-delà d’un aspect esthétique original et très plaisant, donne à voir ce consensus et ses failles, cette dérive et ses possibles contrepoints.

Les sommets sont d’ailleurs souvent atteints par des élus socialistes et communistes, qui rivalisèrent alors de servilité et de lâcheté (« nous pourrions demander la démission de Sarkozy, mais nous ne le ferons pas, ce serait donner raison aux casseurs », Julien Dray). François Athané fustige ces hommes « réputés de gauche » et leur attitude : « A quel titre, du haut de quel point de vue surplombant et omniscient s’autorise-t-on à dire ce qui est sensé et mérite d’être soutenu, et ce qui sera disqualifié comme absurde ou irrationnel ? ». Car face aux « sauvages », les Hollande, Strauss-Kahn et autres Royal savent parfaitement accorder leurs violons avec leur petit maître Nicolas, dont nous est ici retranscrit le discours aux préfets du 28 novembre 2005, dans lequel il annonce un véritable plan de guerre (appelant à une « révolution des mentalités ») saupoudré de propos lepénistes et de phrases où la causalité implicite saute aux yeux (« il est clair que les délinquants doivent être arrêtés et jugés. Il est clair que nous devons intensifier notre lutte contre l’immigration irrégulière »), avec un soupçon d’ « égalité des chances » (« depuis 30 ans, on a voulu porter secours à des territoires, à des zones, à des immeubles, alors qu’il s’agissait d’aider des personnes »).


Face à tout ce vacarme, ce livre constitue une « archive » importante pour contrecarrer l’oubli, et un outil modeste mais stimulant pour ceux qui pensent que « le pays, ce sont les gens qui y vivent », et non pas cette poignée qui danse là-haut, et pour qui « la société » n’est qu’une entité abstraite qu’on s’arrache à coups de « valeurs » et de républicanisme forcé. Des valeurs, des grands hommes, une histoire entre autres taillés à la hache par des « Lettres d’outre-mer » cinglantes, cyniques et décapantes, écrites depuis La Réunion pendant les « évènements » par un certain Jym, qui se fait le porteur d’un souhait, fondamental pour l’avenir, de rencontre politique :

« Puisse cela durer assez longtemps pour qu’il arrive aux meilleurs d’entre nous de voir en eux ce que nous pouvons rêver de vouloir être et réciproquement. »

Une révolte en toute logique
L'archipel des pirates, 2006
260 pages
8 euros

Pour en savoir plus (consulter la table des matières, commander le livre, voir les points de vente…) :
http://larchipeldespirates.monsite.wanadoo.fr/


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16 juin 2006 5 16 /06 /juin /2006 15:48
Loi Sarkozy : le Sénat facture au prix fort l'outrage au drapeau
Un amendement prévoit le retrait de la carte de dix ans aux étrangers.

Libération, vendredi 16 juin 2006


S'agit-il d'un retour de la double peine (prison plus expulsion) supprimée par Nicolas Sarkozy en 2003* ? Coup sur coup, l'Assemblée nationale et le Sénat ont enrichi le projet de loi Sarkozy sur l'immigration et l'intégration d'un article et d'un amendement qui fragilisent la situation des étrangers que leurs liens avec la France rendent en théorie inexpulsables. Une application littérale de la phrase de Sarkozy, fin avril : «Si certains [immigrés] n'aiment pas la France, qu'ils ne se gênent pas pour la quitter.»

Quasi désert. Le 5 mai, en pleine nuit, les députés ont adopté l'article 26 bis qui prévoit que la «carte de résident d'un étranger qui ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion [...] peut lui être retirée» s'il est condamné pour «menaces et actes d'intimidation» ou «rébellion» contre des personnes exerçant une fonction publique. En clair, la police. Dans ce cas, l'étranger perdra sa carte de résident de dix ans, et se retrouvera avec un titre de séjour d'un an, renouvelable chaque année.

Lors de la discussion, les députés n'ont pas moufté. Et pour cause, l'hémicycle était quasiment désert, à l'exception du très sécuritaire Jacques Myard (UMP, Yvelines) : «Je suis convaincu qu'on rend service aux étrangers en leur disant : "Attention, n'allez pas trop loin ! Vous êtes ici en tant qu'étranger. Vous avez le droit de rester en France, mais à condition de respecter les principes fondamentaux qui font la République."» Après s'être exclamé : «Je crains le pire !», Serge Blisko (PS, Paris) s'est abstenu de tout autre commentaire. Et l'article 26 bis a été adopté.

Devant le Sénat, même horaire, même scénario. Un amendement a été voté dans la nuit de mercredi à jeudi selon lequel ces mêmes étrangers pourront également se voir retirer leur titre de séjour s'ils sont condamnés pour «outrage public à l'hymne national ou au drapeau tricolore».

Notion «floue». L'article 26 bis «permet le retrait de la carte de résident aux étrangers condamnés pour avoir commis des violences urbaines ou des violences sur agents. Nous ajoutons aux motifs de retrait la condamnation pour outrage public à l'hymne national ou au drapeau tricolore», a précisé Jean-Patrick Courtois (UMP), auteur avec Serge Dassault (UMP) de l'amendement. Pierre-Yves Collombat (PS) a fait remarquer que «cette notion de rébellion est trop floue, elle est utilisée dans trop de cas pour faire passer des irrégularités de procédure, voire des règlements de compte». Qui plus est, «l'article ne fait aucune référence à la gravité des actes : faire un pied de nez entraînerait la même sanction que des coups et blessures». Josiane Mathon-Poinat (PS) a ajouté que «la menace de rébellion est presque systématiquement invoquée par les forces de l'ordre». Christian Estrosi, ministre de l'Aménagement du territoire, a répondu que «l'étranger qui outrage le drapeau ou l'hymne national démontre qu'il n'est pas intégré». Et l'amendement a été voté.

 Le Réseau éducation sans frontières organisera cet après-midi au Sénat une cérémonie de parrainages d'enfants sans papiers, afin qu'ils «puissent poursuivre leur scolarité en France».

http://www.liberation.fr/page.php?Article=390683


* Commentaire: Contrairement aux propos de l'article, la double peine n'a pas été supprimée dans les faits. De multiples dérogations permettent de continuer à expulser des étrangers qui ont commis un délit. La réforme opérée en 2003 crée simplement de nouvelles catégories d'étrangers bénéficiant d'une protection renforcée face à l'éloignement. Toutefois il convient d'indiquer que non seulement ces catégories ne sont pas de façon absolue à l'abri d'une expulsion (AME) ou d'une interdiction du territoire français (ITF), mais par ailleurs l'appartenance à l'une d'elles suppose de remplir des conditions si nombreuses que le nouveau système ne profitera qu'à un nombre très réduit d'étrangers. Au bout du compte, les étrangers ayant pourtant des attaches en France, qu'elles soient d'ordre privé et/ou familiales, sont toujours exposés au risque de l'exil. Voir la note pratique du GISTI sur http://www.gisti.org/doc/publications/2004/double-peine/index.html
Nicolas Sarkozy déclarait d'ailleurs au sujet des étrangers impliqués dans les troubles de novembre 2005, "J’ai demandé aux préfets qu’ils soient expulsés sans délai de notre territoire national, y compris ceux qui ont un titre de séjour". Le premier d'entre eux, condamné à 4 mois de prison avec sursis assortie de 3 ans d’interdiction du territoire français par le tribunal de grande instance de Bobigny, fut expulsé vers le Mali le 2 février 2006.

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16 juin 2006 5 16 /06 /juin /2006 15:36

Entretien avec Vera Malaguti Batista, sociologue brésilienne

La peur
au service du néolibéralisme


Pour la sociologue, la peur est utilisée par les élites pour paralyser et dépolitiser la société brésilienne.

par Jornal Sem Terra
13 juin 2006

Tout au long de l’histoire de l’humanité, la peur a toujours été utilisée pour dominer et contrôler la société. Au Brésil, en particulier, l’utilisation de ce sentiment, diffusé par les grands médias, criminalise les actions populaires et les mouvements sociaux. Telle est l’idée défendue par la sociologue Vera Malaguti Batista, auteur d’une recherche historique qui montre que la peur, depuis l’époque de la colonisation, est utilisée pour maintenir les hiérarchies, rendant la société plus conservatrice. « Depuis toujours les mouvements de la population brésilienne sont traités comme crime, chahut, désordre, chaos. Je pense que c’est une récurrence historique pour maintenir un ordre très similaire au système esclavocrate impérial », affirme-t-elle.

Selon Vera, dans cette stratégie promue depuis toujours par l’élite brésilienne, les médias de masse sont un outil efficace. « Au Brésil, l’une des choses les plus effrayantes est la domination de l’âme et des esprits de la population brésilienne par le monopole de la télévision. L’existence d’un discours unique fait en sorte que le Mouvements des travailleurs ruraux sans terre (MST) apparaît toujours comme une menace et non comme une grande lutte du peuple brésilien pour sa souveraineté ».

En entretien avec le Jornal Sem Terra, la sociologue défend le fait que, pour freiner cet état de fait, les mouvements sociaux brésiliens doivent s’unir dans la lutte contre le monopole des moyens de communication. « Aujourd’hui, je soutiens que cette lutte devrait être considérée comme une priorité ».

Comment le néolibéralisme utilise-t-il la peur pour maintenir sa domination et son exploitation ?

J’ai fait une étude de l’histoire du Brésil et notamment de Rio de Janeiro, sur les peurs qui apparaissaient au 19e siècle. Ma première observation a été que l’élite, quand elle veut écarter la masse des travailleurs brésiliens, développe, principalement par le biais des médias, une stratégie pour démoniser les actions populaires.

Historiquement, il y a une façon de regarder le peuple brésilien comme une menace, notamment les jeunes des milieux populaires. Dans ma recherche de maîtrise, j’ai travaillé sur les drogues et les jeunes dans la capitale carioca [Rio de Janeiro], et j’ai découvert que si un garçon noir, habitant de la favela, est pris avec la même quantité de drogue qu’un garçon blanc, habitant de la zone sud, les discours construits par le système seront complètement différents. L’un sera dépendant, l’autre trafiquant. Parce que cet autre représente le peuple sur qui il est toujours jeté un regard de méfiance.

Au 19e siècle, la ville de Rio de Janeiro comptait la plus grande concentration d’Africains des Amériques.

La ville blanche et possédante utilisait tout le temps le discours de la peur. Pourtant, ceux qui vivaient dans des conditions de vie horribles, c’était la population africaine, qui était fustigée, mal traitée et soumise aux pires conditions de travail. C’est ce qui explique pourquoi il y avait là une situation sociale explosive.

Au lieu de travailler les conflits par la voie sociale, le discours de la peur fait que l’Etat cesse de répondre aux revendications de la population pour construire un système pénal. Depuis que le néolibéralisme s’est installé au Brésil, avec une plus grande intensité à partir de 1994, notre population pénitentiaire a quintuplé. Le ministère de la Justice travaille dans la perspective qu’en 2007, il y ait 500 mille détenus au Brésil. En 94, ce chiffre était d’environ 100 mille. Nous assistons aujourd’hui à un mouvement de création de précarité sociale, de chômage, de destruction des liens collectifs, de dépolitisation et de criminalisation de la pauvreté.

Le Mouvement des sans terre (MST) est un exemple de cela. Le Mouvement mène une lutte légitime qui remonte à l’origine de l’histoire du Brésil. C’est ce que le professeur et philosophe Marildo Menegatti appelle les révolutions différées.

Quelles sont les conséquences pour la société brésilienne ?

Dans les années 60, sous le gouvernement de João Goulart [1], quand on discutait les réformes de base, la peur de la révolution, la peur de la violence s’est distillée dans la presse, quand en réalité c’était le moment où le peuple brésilien par sa mobilisation essayait d’avancer. Aujourd’hui nous assistons non seulement à la criminalisation du MST, mais aussi à celle du travail précaire, des enfants des rues. Un pays décent regarderait ces enfants abandonnés dans la rue d’un regard solidaire, qui reconnaîtrait en eux ses propres enfants. Pourtant, la peur fait que la société érige davantage de prisons, davantage de grillages, davantage de murs, renforçant ainsi la distance entre la pauvreté et une petite élite qui accumule toujours plus de richesses. Le plus curieux et le plus absurde de tout cela c’est que c’est cette bourgeoisie la plus protégée qui diffuse le plus sa peur. Tandis que celle qui vit la barbarie, c’est la population pauvre de la campagne et de la ville.

C’est pour tout cela que la peur est un instrument fondamental pour conserver la hiérarchie de la société. Au 19e siècle, il n’y avait rien de plus légitime que la rébellion esclave, étant données les conditions dans lesquelles ces personnes vivaient. Pourtant, la presse de cette époque faisait référence aux quilombos dans les mêmes termes qu’aujourd’hui les médias montrent la favela, le bal funk, le commerce de drogues, les vendeurs ambulants. Les grands nœuds qui existent dans la société brésilienne, comme l’accès à la terre et à l’éducation, ont leur origine dans la manière selon laquelle le Brésil s’est construit : en excluant son peuple des richesses.

La peur est un outil fondamental pour maintenir ce mécanisme parce qu’elle est paralysante et rend la société conservatrice. Une population qui a peur de la favela va vouloir que l’on en extermine les habitants. C’est pour cette raison que la mort quotidienne des jeunes qui y vivent est vue comme quelque chose de naturel. Tout comme au 19e siècle, les capoeiristas étaient exterminés parce qu’ils représentaient une menace pour la société esclavocrate. Quand nous regardons la réalité actuelle, nous comprenons que les problèmes du 19e siècle sont encore là. Les mouvements de la population brésilienne sont traités comme crime, désordre, chaos. Je pense que c’est une récurrence historique pour maintenir un ordre très similaire au système esclavocrate impérial.

La peur paralyse la société et la rend conservatrice. Ce n’est pas un sentiment libérateur, au contraire, elle fait en sorte que les personnes se ferment, se méfient les unes des autres. Tout au long de l’histoire de l’humanité, ce sentiment a été d’une grande utilité. Le nazisme, l’Inquisition de l’Eglise, les Etats-Unis avec la persécution de l’Islam, en sont des exemples clairs. Le choix d’un ennemi crée la propagation de la peur, qui produit des résultats concrets, tels que la criminalisation des luttes sociales, la création de boucs émissaires, l’obsession pour la sécurité publique. Si nous discutions de ces thèmes sans la propagation de la peur promue par les médias, nous serions en train de parler de réforme agraire, d’éducation publique, de programmes sociaux, de santé, de travail. Pourtant, plus on se sent instable dans le néolibéralisme par rapport à la sécurité de l’emploi, par rapport à l’accès à la santé, plus on se sent fragilisé dans cet ordre économique, plus on devient conservateur.

Et quel est le rôle des médias dans cette stratégie ?

Les médias sont les protagonistes de cette histoire. Sans eux, il ne serait pas possible de diffuser la peur. Les mouvements sociaux et populaires sont vus comme une menace à l’ordre, ce qui a pour résultat que la société concède une réponse pénale et non politique, économique et sociale à ces phénomènes. Ce mécanisme est très efficace pour conserver les choses telles qu’elles sont pour de nombreuses années encore dans notre société. Au Brésil, l’une des choses les plus effrayantes est la domination de l’âme et des esprits de la population brésilienne par le monopole de la télévision. L’existence d’un discours télévisé unique fait en sorte que le MST apparaisse toujours comme terrifiant et violent, et non comme une grande et belle lutte du peuple brésilien pour sa souveraineté. Les gens subissent un monopole des médias et un discours unique qui travaille la peur tout le temps. C’est un mécanisme subtile et subjectif, mais qui a un pouvoir extraordinaire.

Une illustration, c’est ce qui est en train de se passer en Bolivie avec la nationalisation du gaz. Les Boliviens sont en train d’exercer leur droit souverain de s’approprier leurs propres ressources naturelles. Pourtant, les médias provoquent une fausse crise, ils construisent une autre réalité pour nous éloigner des conquêtes du peuple bolivien, tout comme du vénézuélien, ce qui provoque la désagrégation de ce moment historique que nous vivons en Amérique latine. La peur de Chávez, la peur de Fidel représentent les grands fantômes de l’Amérique latine parce qu’ils sont le symbole du peuple.

Cette crainte apparaît, d’une certaine manière, dans l’inscription “ordre et progrès” qui se trouve sur le plus grand symbole du pays, le drapeau national.

Oui, et dans ce type d’ordre, la hiérarchie sociale ne peut pas être remise en question. Chacun doit rester à sa place. Au 19e siècle, nous avons connu ici plusieurs rébellions populaires dans tout le pays, d’Oiapoque à Chuí. De Farroupilha, dans le sud, à Cabanagem, dans le Pará [nord], celle des Malês à Bahia, celle de Praieria dans le Pernambuco. Ce fut une période de grande peur, peur de voir le peuple arriver au pouvoir, ce qui prouve que c’est une situation qui existe depuis toujours. Les colonisateurs sont entrés sur le territoire latino-américain, comme si les indiens représentaient une menace, alors qu’en réalité ce furent les Espagnols et les Portugais qui ont promu un génocide sur tout le continent. Nous voyons ceci aujourd’hui quand les Etats-Unis traitent la résistance en Irak comme du terrorisme, alors que ce sont les Irakiens qui sont en train d’être terrorisés.

Au Brésil, la société est amenée à avoir un regard négatif sur le MST, alors que c’est un mouvement envers qui elle aurait naturellement de la sympathie. Tout cet effort est fait pour maintenir une distance entre organisations populaires et société, parce que la peur maintient à distance.

Comment peut-on faire face à cette conjoncture ?

Nous devons conserver nos luttes sectorielles : pour la terre, l’éducation, la santé, à la ville comme à la campagne. Mais nous devons tous, de manière très intense, lutter contre le monopole des médias. Quand un gouvernement qui se dit progressiste, se soumet à ces moyens de communication, on finit par reculer, autrement dit, nous sommes à la merci de ce pouvoir médiatique immense de création d’une réalité politique déterminée. Aujourd’hui, je soutiens que c’est une lutte qui devrait être considérée comme prioritaire. C’est là que tous les mouvements sociaux brésiliens devraient s’unir, parce qu’aujourd’hui nous n’avons pas de voix. Même un mouvement comme le MST, qui dispose d’une grande et une profonde organisation, finit par ne pas avoir d’espace ou par être manipulé, apparaissant comme un danger pour le Brésil.

Notes:

[1] [NDLR] Le régime démocratique du président Joao Goulart a été renversé par les militaires en avril 1964. Goulart avait annoncé qu’il allait mettre en pratique une réforme agraire radicale et qu’il allait procéder à la nationalisation des raffineries de pétrole. Il fut renversé par les militaires. Le lendemain du coup, les Etats-Unis reconnaissaient le nouveau régime militaire. La dictature a pris fin en 1985.



Source : Sem Terra, journal du MST (http://www.mst.org.br/), année XXIV, n°62, mai 2006.

Traduction : Isabelle Dos Reis, pour le RISAL (http://www.risal.collectifs.net/).

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15 juin 2006 4 15 /06 /juin /2006 21:29
 
Le BLIS-RESF N°27
(Bulletin de liaison Intermittent et sporadique)
du Réseau Education Sans Frontières
vient de paraître.

Edito

Il paraît que Monsieur Sarkozy, ministre de l’Intérieur et grand ordonnateur de la saison de chasse à l’enfant de l’été 2006 a été pris d’une crise de bienveillance droit-de-l’hommiste. Très passagère et très bénigne ! Mais quand même.

Il aurait donc déclaré au Sénat qu’il serait « trop cruel » [oui ! oui ! « cruel » a-t-il dit !] de renvoyer de force des enfants nés en France, scolarisés dans ce pays et qui ne parleraient pas la langue natale de leurs parents. Quel laxisme ! Mais, à l’inverse, la conclusion s’impose : il est juste cruel comme il convient de renvoyer de force, menottés et entravés comme des bêtes, des parents dont les enfants ne sont pas nés en France et qui, les bougres ! n’ont pas oublié la langue de leurs grands parents. Il est normalement cruel de renvoyer Rachel et Jonathan (les deux adolescents qui s’étaient enfuis pour bloquer l’expulsion de leur mère) en RDC. Que leur mère risque d’y subir à nouveau les violences qui l’ont obligée à fuir n’est pas trop cruel, c’est électoralement payant. Il n’est pas cruel non plus d’expulser Guy Effeye, lycéen d’Épinay, père d’un enfant d’un an, que ses copains étaient allés arracher à l’avion à Roissy en septembre dernier. On pourrait multiplier les exemples par cent, par mille. Mais c’est inutile : le ministre lui-même s’est chargé de donner la mesure de son sens humanitaire : ridiculement petite. En effet, selon les chiffres mêmes du gouvernement (estimation IGAS publiée par Le Figaro), 50 000 familles n’auraient pas de papiers... Quand il est pris d’une crise de delirium humaniterens... M. Sarkozy propose de régulariser 720 familles, soit 1 à 2 % des 50 à 100 000 familles dans ce cas ! Saluez l’exploit !

(...)

 Au sommaire : 

p. 3-4 L’odyssée forcée de Mariam Sylla.

p. 4-5 La police traque dans une maternelle du au Mans

p. 6 Patimat, Alex et David B. sous notre Protection

p. 8 Mobilisations : Lyon, Evreux, Paris

p. 10 Libérations arrachées

p. 14 Rassemblements du 31 mai

p. 15 Nouveaux collectifs

p. 16 Agendas

Pour lire/ télécharger le BLIS :
http://www.educationsansfrontieres.org/rubrique.php3?id_rubrique=19
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15 juin 2006 4 15 /06 /juin /2006 21:24
communiqué de presse "D'abord le projet"
Les ALTERNATIFS
solidarités - écologie - féminisme - autogestion
Fédération des Alpes-Maritimes
 
D'ABORD LE PROJET ET L'EQUIPE... ENSUITE LES CANDIDATURES !

 
    " Partie prenante de la campagne victorieuse du non de gauche en 2005 et des collectifs du 29 mai, les Alternatifs sont pleinemant engagés dans la dynamique de rassemblement autour de l'appel "pour un rassemblement antilibéral de gauche et des candidatures unitaires" aux législatives et à la présidentielle en 2007 et ils participent activement à la mise en place des collectifs locaux d'initiative unitaires et populaires.

    L'enjeu essentiel du prochain scrutin présidentiel sera de mettre en avant un projet alternatif en rupture avec les politiques libérales, mais aussi la critique radicale des institutions anti-démocratiques de la Ve République.

    L'élaboration de ce projet et la mise sur pied d'une équipe pluraliste pour le porter doivent être la priorité du rassemblement. Considérer aujourd'hui le nom du-de la candidat-e comme non essentiel est un choix politique : celui d'une autre pratique politique critique, en actes, des institutions de la Ve République.

    Enfin, les Alternatifs saluent les déclarations de José Bové, venant après d'autres, comme celles de Marie-George Buffet : il est positif que plusieurs noms représentatifs du rassemblement apparaissent, et meilleur encore que parmi ces noms figure une personnalité altermondialiste capable de fédérer le rassemblement de toute la gauche antilibérale. "

 
pour la coordination départementale des Alternatifs
Bruno Della Sudda, porte-parole départemental
Nice, le 15 juin 2006
 
 
                                                                   
Les Alternatifs
B.P. 2016 - 06101 NICE cedex 2

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14 juin 2006 3 14 /06 /juin /2006 23:08

Présidentielle 2007.
José Bové :
"Pourquoi j'y vais"


Dans un entretien accordé à Libération, le leader paysan José Bové explique pourquoi il se considère comme le mieux placé pour mener la campagne présidentielle de 2007 au nom de la gauche de la gauche.

Vous êtes donc candidat à l'Elysée ?

Je suis candidat à rassembler, à la gauche du PS, une gauche antilibérale, écologique, antiproductiviste et altermondialiste. Et je suis prêt à assumer la responsabilité d'aller à l'Elysée. Mais je m'inscris dans une démarche collective. Elle fait suite à la dynamique créée par la campagne qui a amené au vote du 29 mai 2005. Il est clair que la candidature socialiste émerge de la droite du PS et ouvre un espace pour une candidature antilibérale à la gauche du PS.

Pourquoi estimez-vous être mieux placé qu'Olivier Besancenot ou Marie-George Buffet pour porter cette candidature ?

Aujourd'hui, dans le cadre d'un front large, il y a des partis politiques, des associations, des mouvements, des syndicalistes. Ces gens-là, y compris une majorité de l'électorat vert, sont prêts à enclencher cette dynamique. A l'intérieur de ce groupe, il existe une rivalité entre le PCF et la LCR. Chacun pense qu'il est le mieux placé pour prendre le leadership. Mais aucun des chefs d'une de ces deux organisations n'est en capacité de rassembler tout l'éventail de ce front. Pour dépasser cette rivalité, je suis prêt à être candidat. Si cette décision est collective et portée par tous, j'irai jusqu'au bout.

La dynamique autour de Ségolène Royal renforce-t-elle votre détermination ?

Avec Ségolène Royal, c'est une droite du PS qui est représentée. On est clairement dans l'accompagnement du modèle économique libéral.

Quel sont les axes de votre programme ?

A partir du travail accompli dans le cadre des collectifs du 29 mai, avec les organisations syndicales, les mouvements sociaux, on veut rassembler l'ensemble des préoccupations des citoyens en matière de sécurité de l'emploi, de lutte contre la flexibilité, de garantie de minima sociaux. Il faut légiférer pour taxer les entreprises qui délocalisent ou qui engrangent de forts bénéfices en licenciant leurs salariés.

Comment lutter contre le chômage de masse ?

Si on prend le domaine de l'énergie et la problématique du renchérissement du pétrole, l'exemple allemand démontre que la création d'emplois passe par les énergies alternatives, les économies d'énergie. Les chantiers d'amélioration de l'habitat sont créateurs de milliers d'emplois pérennes, comme les projets alternatifs à l'EPR. Aujourd'hui, on nous parle du développement des entreprises de service par la conquête de marchés extérieurs. Mais ce n'est pas parce qu'elles créent artificiellement de la plus-value qu'elles créent des emplois à la clé.

Faut-il poursuivre la réduction du temps de travail ?

Oui. J'avais été partisan, à l'époque, des 32 heures qui auraient permis de créer plus d'emplois que les 35 heures. Aujourd'hui, on nous dit : il faut que les gens travaillent plus ! Or la productivité du travail n'a jamais été aussi importante. Mais la réalité c'est qu'elle ne profite pas à tout le monde, notamment aux salariés.

Ségolène Royal a expliqué que les 35 heures et le gel des salaires avaient pénalisé les classes populaires. Comment comptez-vous relever le pouvoir d'achat ?

Il faut remonter le Smic, et pas dans un délai de cinq ans comme le propose le PS. Et faire en sorte que la flexibilité ne soit pas la conséquence des 35 heures.

Partagez-vous les propositions de Ségolène Royal sur la sécurité ?

Aujourd'hui, il y a d'abord une faillite du système républicain. On voit dans les banlieues un racisme et une exclusion insupportables. La première insécurité, c'est une société qui fabrique de la pauvreté et des exclus. Dans les banlieues, on a des ghettos avec des taux de chômage des jeunes de 30 % voire 40 %.

Cette délinquance, ce sont souvent les classes populaires qui en payent le prix...

Traiter la délinquance comme une cause et non une conséquence, avec des mesures militaro-sécuritaires, me paraît dangereux. Cela donne l'impression qu'on est dans une situation de guerre civile. C'est une propagande que l'on voit fleurir depuis une quinzaine d'années, chez Le Pen d'abord, puis chez Sarkozy et aujourd'hui chez tous ceux qui essaient de cristalliser le débat sur ces questions pour éviter de parler des vrais problèmes.

Il n'y a pas eu de «plan B». Que proposez-vous pour relancer la construction européenne ?

La France, qui va présider l'Union européenne en 2008, devra proposer que les parlementaires européens élus en 2009 se réunissent en Assemblée constituante. La majorité qui a voté non au référendum n'est pas eurosceptique ou antieuropéenne.

Quel score espérez-vous en 2007 ?

La dynamique unitaire devrait placer cette candidature dans le carré de tête au premier tour.

Vous désisterez-vous pour un candidat de gauche ayant voté oui le 29 mai 2005 ?

La décision se prendra en fonction des engagements pris par ce candidat. Ce désistement devra être réciproque si j'arrive en tête à gauche au premier tour.


Extraits de Libération du 14 Juin 2006.


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14 juin 2006 3 14 /06 /juin /2006 23:05
Texte adopté par le collectif unitaire national
 
Collectif national d’initiative
Pour un rassemblement antilibéral de gauche

Et des candidatures communes.

 

 

Des collectifs unitaires et populaires

partout, vite !

 

Depuis vingt ans, les conquêtes sociales sont mises à mal par les différentes variantes des politiques libérales. La politique de Raffarin et Villepin achève le démantèlement des piliers essentiels du « modèle social français ». Il est temps de mettre un coup d’arrêt à ces politiques qui généralisent l’insécurité sociale pour détruire les solidarités et désarmer les résistances.

 

Depuis plusieurs années, mobilisations sociales et votes sanction contestent ces politiques. Le Non majoritaire le 29 mai 2005 pour rejeter une Constitution libérale pour l’Europe, la révolte des jeunes des banlieues à l’automne 2005, la formidable mobilisation des jeunes et des salariés au printemps 2006 pour rejeter la précarisation aggravée de la société, le refus de la loi sur « l’immigration jetable » aujourd’hui, en sont les dernières illustrations. Et le 21 avril 2002 est là pour nous rappeler que les alternances sans changement réel ne répondent pas aux attentes populaires.

 

Il est temps de battre la droite et les politiques libérales et d’ouvrir une nouvelle perspective à gauche. C’est dans cette ambition que s’inscrit l’Appel « pour un rassemblement antilibéral de gauche et des candidatures communes : il y a urgence ! » (voir ci-joint).

 

Il affirme que « seule une union de toutes les énergies antilibérales autour d’un projet commun, seules des candidatures communes antilibérales de gauche aux élections présidentielles et législatives peuvent ouvrir la voie à une authentique alternative (…) faute de quoi l’exaspération et la détresse populaire risquent de se traduire en abstention et de profiter à la droite extrême ou à l’extrême droite ».

 

Il propose la création d’un « collectif national d’initiative » et invite à créer partout des « collectifs locaux d’initiative, unitaires et populaires » afin de « discuter de toutes les questions auxquelles ce rassemblement devra répondre, de lever les derniers obstacles et de concrétiser cette campagne ».

 

Le Collectif d’initiative national s’est mis en place. De nombreux collectifs locaux se créent. Pour éviter des interprétations disparates dans la mise en œuvre sur le terrain, cette note vise à préciser le souhaitable en la matière, rappelant notre ambition, notre projet, notre démarche, notre conception. Ceci afin d’avoir une référence commune nationale pouvant servir de repère (et d’arbitrage en cas de difficulté) pour les initiatives locales. Il a été également souhaité qu’ils puissent avoir une dénomination commune ou une référence commune.

 

 

Objectif : des collectifs unitaires et populaires :

 

UNITAIRES : cela signifie que, dès le départ, lors de la constitution des collectifs locaux, nous visons au minimum à rassembler toutes les forces et sensibilités représentées dans l’appel national, dès lors qu’elles sont présentes localement. Mais il faut viser plus large en invitant des groupes ou courants politiques présents localement, des personnalités reconnues du monde syndical, associatif, universitaire, culturel, etc. Il s’agit bien de rassembler toutes celles et ceux qui rejettent les politiques libérales et aspirent à une alternative. Attention donc à ne pas jouer « petit bras » ou à aboutir à des comités « concurrents » dans un même lieu.

 

POPULAIRES : cela signifie que notre ambition est d’aller bien au-delà des cercles des militants politiques, à la manière de l’investissement citoyen dans les collectifs unitaires qui s’était développé au plus fort de la campagne contre le Traité constitutionnel européen. Des dizaines de milliers de militants associatifs et syndicaux ou simples citoyens conscients s’étaient investis dans la bataille. Cet apport fut décisif pour la victoire.

Il faut donc viser la même dynamique. Bien sûr, cette ambition ne pourra se concrétiser pleinement que quand l’accord unitaire sera finalisé avec ses portes paroles et candidat communs. Mais il faut avoir cette ambition en tête dès le départ et construire les initiatives en conséquences.

 

Des collectifs de proximité partout :

 

Les collectifs commencent à se créer. Certains au niveau d’un département ou d’une ville ; d’autres à un niveau plus décentralisé. Dès la rentrée de septembre et plus encore quand nous aurons bouclé l’accord unitaire, de tels collectifs devront essaimer dans les villages, quartiers et entreprises, au plus près des citoyen/ne/s. Cette dimension de proximité est nécessaire à la pleine dimension populaire. C’est cet enracinement populaire de proximité qui donnera toute sa force d’entraînement à notre campagne et qui permettra, comme lors de la campagne référendaire, de surmonter les obstacles médiatiques et de toucher les millions d’électeurs.

 

Les conditions de lancement :

 

Elle peuvent évidemment être variables selon les réalités locales, mais elles ne peuvent pas être contradictoires avec notre ambition de collectifs « unitaires et populaires ». Réunion unitaire des organisations, initiative de citoyen/ne/s engagé/e/s dans les collectifs du 29 mai, ou autres,  l’essentiel est la référence partagée à l’appel national et à sa philosophie et la volonté de construire tous ensemble.

Comment populariser ces créations ? C’est à chacun d’apprécier localement la formule la plus adaptée : signature de l’Appel par les principales « personnalités » locales et large diffusion, tenue de conférences de presse locales avec les principaux porte-paroles, réunions publiques, etc ; l’objectif étant de bien rendre visible la création de ce collectif et les forces, courants et individus qui le portent.

 

Débattre et convaincre des possibilités d’une alternative :

 

L’aspiration des militants et l’espoir des citoyens pour un réel changement sont forts. Mais des doutes existent aussi : sur la possibilité d’une autre politique, sur la possibilité d’aboutir à des candidatures unitaires à la présidentielles et aux législatives. Les collectifs doivent développer leur action et leurs initiatives pour répondre à cette double interrogation, tout en s’inscrivant dans les luttes et mobilisations.

 

Nous ne partons pas de rien. Le travail des collectifs du 29 mai autour d’une « Charte pour une alternative au libéralisme » fournit un socle commun partagé par toutes les forces engagées dans le Collectif national d’initiative (et même au-delà puisque y ont participé des forces associatives et syndicales). C’est un outil de travail qui permet dès aujourd’hui d’alimenter réflexions et débats. D’autres propositions complémentaires viendront en débat au fur et à mesure que des propositions communes seront affinées par notre rassemblement à partir des apports de ses différentes composantes, des débats décentralisées, des réflexions syndicales, associatives  et politiques.

 

Multiplier les initiatives publiques

 

Il ne s’agit pas de s’enfermer en vase clos pour débattre programme et candidats mais bien de développer les initiatives publiques. Il faut donc développer le débat autour des enjeux de l’alternative et des candidatures unitaires en se tournant le plus possible vers les citoyennes et citoyens.

Les Universités d’été des différentes organisations ou la Fête de l’Humanité seront nécessairement traversées par ces débats. Une rencontre nationale des collectifs constitués ou en voie de constitution le 9 septembre permettra d’assurer la visibilité autonome de notre démarche et d’amplifier la dynamique à la rentrée.

 

Le 14 juin 2006

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14 juin 2006 3 14 /06 /juin /2006 19:29
http://demesuredupossible.joueb.com/
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